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hkg bkk - Balade à travers la Chine, le Vietnam, le Cambodge, le Laos et la Thailande
3 avril 2010

Ninh Binh ou le vent de la liberté

Un biker, c’est un homme libre. Et que c’est bon la liberté. Le vent qui vous fouette la gueule parce qu’une visière ça’l fait pas, et que ce qu’on veut c’est des mèches qui dépassent, et montrer ses lunettes noires. Si possible, on arbore un T-shirt un peu provoc, et on file, en passant les vitesses parce que la reprise c’est toujours excitant, et en gardant la main droite bien ferme sur le grip, à t’en faire des ampoules. Et moi j’ai toujours rêvé de dire ce genre de truc : « Ecoute comme elle ronronne cette bécane. T’as pas plus belle femme dans la région. » Alors à Tam Coc, non loin de Ninh Binh, surnommée la Baie d’Along terrestre, j’ai filé sur une petite 125 pourrie, mais comme j’ai pas trop l’habitude de ces machines, j’avais déjà l’impression que ça allait vite. Mais de toute façon, les bikers, les vrais, ceux qui ont le nom de leur moto tatoué sur le cœur, ça ne va pas forcément très vite, parce que mieux vaut ne pas la rayer, car ça ne serait pas la respecter.

 

 

NinhBinh_02

 

 

J’ai donc pu observer de fort agréable manière les paysages décoiffants des alentours de Ninh Binh. Moteur hurlant, je zigzaguais entre ces grands caillous sortis de nulle part et je fendais des rizières si planes et fluo, que j’ai l’espace d’un instant eu envie d’aller y rentrer quelques putts. Mais le golf c’est pas pour les bikers, les vrais, alors j’ai pensé au billiard, parce que dans tout bon relais routier, il faut un juke-box et une table de billard, parce qu’outre le fait que cela soit sympa, cela constitue aussi d’excellentes armes en cas de regard de travers.

 

 

 

NinhBinh_06

 

De temps en temps, des travailleurs dans les champs. A mon passage, ils se détournent de leur piquage au subtil bruit du moteur, et admirent le chrome de l’ensemble. « C’est vrai qu’elle chante bien ma bécane. Et qu’est ce qu’elle est belle ! » Mais ma bécane elle est comme un cheval de course, fidèle et de temps en temps un peu fatiguée. Alors je lui dis : « C’est bien ma chérie, t’as déjà bien roulé, j’vais t’laisser souffler un peu. » Moi j’en profite pour la regarder encore et encore et pour passer un coup de chiffon pour qu’elle brille davantage que toute les autres. Je la caresse et la remercie, je lui sussure des mots doux. Mais dans ce moment si intime, nous furent alerter par des bruits suspects : des incantations ou en tout cas des gens qui priaient quelque chose. Tout cela avait l’air de se dérouler dans une propriété privée. « Dors seulement un peu, je vais voir s’ils prient le bon Dieu. Moi je suis un biker, je suis libre, et Dieu est le seul à pouvoir m’interdire l’accès à quoi que ce soit. » J’embrasse ma croix en or, sur laquelle j’ai dernièrement fait graver le nom de ma machine et celui de mon bulldog, et je me dirige vers le portail.

 

 

NinhBinh_05

 

J’arrive dans une sorte de petite cour intérieure, et je ne sais pas pourquoi, mais on m’a tout de suite remarqué quand je suis entré. Mais c’est comme quand un gars de New-York débarque dans un bar du trou du cul de l’Oklahoma parce qu’il est tombé en panne sèche. On m’invite à m’asseoir immédiatement, mais on ne me regarde pas bizarre, on ne me défie pas du regard, on ne fait pas la blague aux potes qui sont aux comptoirs : « Eh c’est qui cette gonzesse », et au nouveau venu, « Salut princesse, t’as pas oublier ton sac à main dans ton carosse des fois. » Non rien de tout ça. A la place on me propose du thé. J’aurais pas craché sur une bonne Bud apres tant de kilomètres, mais apparemment c’était ni l’heure ni l’endroit. Le gars, l’ancien en fait qui m’a invité, et moi ne parlons pas le même anglais, mais c’est pas grave on se marre bien quand même, sans rien se dire, juste en se regardant et en faisant des gestes, lui avec ses mains d’ancien, et moi avec mes mains de biker. Comme le courant passe bien entre nous, je pense que quand il était plus jeune il avait dû être biker lui aussi, ou alors il aurait voulu l’être, et donc c’est un mec que je respecte. On a les deux de l’essence dans les veines.

 

A côté de papy, dans un petit temple, les gens continuent à bredouiller des psalmodies incompréhensibles, accompagnées par un guitariste qui n’a vraissemblablement jamais écouté Judas Priest, et deux trois tambours qui sonnent comme celui de la machine à laver de ma femme. Si seulement j’avais amené mon harmonica. Inutile de vous préciser que ces gens là sont des vaudous, et ne prient pas Dieu. Non, ils se foutent des napperons sur la tête avant d’y placer des plateaux avec des oranges, des bananes, des bâtonnets qui brûlent et des billets qui ne sont pas de la même couleur que mes dollars. Tout ça ne se passe pas dans nos églises. Mais c’est marrant, et les gens sont souriants et accueillants. A un moment même ils se partagent les liasses de billets qui ornaient les plateaux, et comme je suis là au milieu, j’en reçois une aussi. God’s Sake ! dans ce pays où l’on ne vous parle normalement que pour votre pognon.

 

 

NinhBinh_04

 

 

A un moment aussi, ils sortent avec des espèces de poupées en papier représentant des animaux et des êtres humains, et ils vont les brûler sur un bûcher. Ça me rappelle quelque chose, mais je ne parviens pas à obtenir la signification de cette cérémonie. Tout ce que je sais c’est que ça donne chaud et que l’on n’avait pas besoin de ça.

 

 

NinhBinh_01

 

Après deux heures de repos bien mérité, je quitte mes nouveaux potes dont je ne sais pas grand chose, pour aller retrouver ma bécane. J’ai envie de leur dire « J’espère vous revoir un jour, et si vous avez un problème avec votre bécane, n’hésitez pas, moi et mes potes on sera toujours là. God bless you. ». Je redémarre ma machine, et apprécie de l’entendre vrombir à nouveau. Je prends des petites routes, des chemins, et je me dis que c’est grâce à elle, que j’ai pu rencontrer ces gens, et partager des carafes de thé en écoutant de la musique hindoue. C’est ça la liberté, c’est pouvoir aller où l’on veut. Je progresse alors au hasard car rien n’a d’importance pour un biker, sauf le respect des autres bikers, et l'amour de sa machine bien sûr.

 

 

NinhBinh_03

 

 

Alors que je rentre à mon motel, je croise un cortège. C'est un peu comme à Daytona, mais sans motorbike. Très vite je comprends que c’est un enterrement. J’éteins ma bécane, je retire mon casque, j’enlève mes lunettes noires, je me lève, et en devenant en apparence seulement un homme normal, je prie pour que cette personne soit bien accueillie chez le ou les dieux qu’elle a choisis, au nom de tous les bikers du monde et de toutes les belles bécanes que cette chienne de Terre peut connaître. Alors que vous n’y pensez pas, la fin peut venir vous frapper à la sortie de chaque tournant. Alors avec ma motorbike, on s'est juré de tourner le plus longtemps possible.

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Commentaires
D
Yes Papi !<br /> Sabay Sabay !<br /> <br /> C est genial la motorbike! Atention a la 1ere, elle depote !
F
tu m'en fais un sacré de biker!!!<br /> encore qq poils sur le menton, un peu de bidon et ce sera bon!!!
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